Église inscrite à l’Inv. Suppl. des M. H. le 1er février 1999
Aux environs de l’an 1150, le Livre rouge de Dax indique que l’église Sancta Maria de Gonossa verse chaque année à la cathédrale 6 conques de froment et 12 de millet. Le montant relativement faible de cette redevance, et donc sans doute aussi celui des revenus de la paroisse ne peuvent manifestement expliquer la qualité et l’originalité assez remarquables présentées aussi bien par la construction originelle de l’église, que par toutes les transformations qui lui ont été apportées au cours des siècles.
Les deux étapes de la construction romane
L’édifice actuel conserve des parties significatives de la nef d’une première église que l’on peut sans hésiter dater du XIe siècle : sur une longueur d’environ 12 m, le mur nord apparaît fait d’une maçonnerie de petits moellons, doublée à l’intérieur par une banquette, et il était percé d’une porte aujourd’hui murée, qui était fermée par un curieux linteau monolithe orné de trois motifs en creux.
Le mur sud n’a été conservé que dans sa partie supérieure : on y observe également des fenêtres à simple ébrasement, qui sont ici placées très haut, mais qui présentaient à l’extérieur une forme en trou de serrure bien connue à l’époque préromane au sud des Pyrénées, mais jusqu’ici inédite au nord de la chaîne.
On ignore tout du chevet qui complétait ces éléments, car il a été remplacé au siècle suivant par l’abside actuelle. Cette abside et la portion de mur qui la relie aux maçonneries anciennes sont faites d’un moyen appareil régulier. Les trois fenêtres qui éclairent l’abside s’ouvrent à l’intérieur et à l’extérieur dans une arcade portée par des colonnettes, et entourée par une archivolte.
Des bandeaux moulurés ou ornés d’une frise de palmettes courent à la base des fenêtres ou relient les tailloirs.
Les chapiteaux sont ornés soit d’une ou de deux rangées de feuilles lisses parfois terminées par des boules, soit de palmes, de gerbes de crossettes ou d’oiseaux affrontés.
Ces thèmes, comme la manière dont ils sont traités, permettent d’attribuer l’ensemble à une date assez proche du milieu du XIIe siècle.
L’abside et sa travée droite devaient être voûtées en berceau et cul-de-four. En revanche, la nef, dépourvue de contreforts, n’était certainement couverte que d’une charpente.
Les transformations des xive–xvie siècles
Vers le début du xive siècle, la transformation de l’édifice originel a été achevée par la construction, à quelque 3 m au-delà de l’ancienne, d’une nouvelle façade occidentale de près de 2 m d’épaisseur, dont la partie supérieure est ajourée pour recevoir les cloches, et dont la partie inférieure est percés d’un large portail, dont les trois ébrasements sont ornés de colonnettes portant des voussures moulurées.
De part et d’autre de ce portail, des pilastres supportent les extrémités d’une file de petites arcades décorées en bas-relief.
Dans cet ensemble très original, les nombreux emprunts au répertoire décoratif roman des chapiteaux et des tailloirs, et la référence au décor d’arcatures du premier art roman méridional sont associés à des voussures en arc brisé et au profil en tore orné d’un petit filet en relief. La façade ainsi décorée a été reliée à la nef du côté sud par un massif abritant une tourelle d’escalier.
Pour tenter de mettre la population à l’abri des troubles de la Guerre de Cent Ans on a un peu plus tard protégé la façade, non par une tour, comme généralement ailleurs, mais par un porche à deux étages percés de meurtrières ultérieurement transformées en canonnières par le percement d’un trou circulaire à leur base.
Enfin, le retour de la paix a permis d’entreprendre vers la fin du XVe siècle non seulement une réparation de l’édifice, mais son agrandissement, et enfin son embellissement selon les goûts de l’époque.
Une première phase des travaux a concerné la construction sur le flanc sud d’un collatéral d’une longueur égale à celle de la nef et de la travée droite du chœur.
Ce collatéral s’ouvre par quatre arcades retombant sur des consoles moulurées ou historiées engagées dans des piles cylindriques ; il est éclairé par quatre fenêtres à remplage, et il est couvert de quatre voûtes, la plus orientale sur ogives simples, les deux suivantes en étoile sur ogives, liernes et tiercerons, la dernière de plan losangé à quatre clés.
Une seconde phase a permis de voûter également le vaisseau principal : dans la nef, des voûtes sur ogives simples reposent sur des colonnes engagées et sur des consoles disposées aux angles ; dans l’abside, quatre des nervures de la voûte retombent sur des bases moulurées appliquées au-dessus du bandeau reliant les tailloirs des chapiteaux. Entre ces nervures, le mur reconstruit est de plan polygonal, et non plus semi-circulaire comme dans la partie basse romane.
Toutes ces dispositions ont été conçues et disposées avec une ingéniosité qui leur permet de répondre parfaitement aux problèmes posés. La qualité des quelques éléments sculptés qui leur sont intégrés se retrouve dans le portail flamboyant au demeurant assez simple qui a été appliqué à la même époque contre la façade méridionale du porche.
Les travaux de l’époque moderne et contemporaine
L’édifice ainsi transformé n’a subi par la suite que peu de modifications : au xviiie siècle, on l’a pourvu d’une sacristie de plan polygonal, qui a été revêtue à l’intérieur de moulures de stuc et dotée d’un mobilier de belle qualité.
À la même époque, on a refait le sol du sanctuaire en dalles de pierre de Bidache, on a établi un emmarchement en forme de perron semi-circulaire, et une belle table de communion en fer forgé avec boules de cuivre poli. Une grille analogue, mais ornée d’appliques et boules de cuivre, a été utilisée pour l’escalier de la chaire, dont seul l’abat-voix est orné. Les autels et les retables sans doute également réalisés à la même époque ont été remplacés au xixe siècle par des autels de marbre blanc de style néo-roman.
Au xxe siècle, outre divers travaux de réparation ou d’entretien, on a profondément changé l’aspect extérieur de l’édifice, dans les années 1910-1920 par l’application sur toutes les maçonneries d‘un même enduit hydraulique orné de faux joints, en 1984-1985 par l’enlèvement de ces enduits sur le porche, en laissant à nu les moellons irréguliers des murs.
Ces dernières interventions ont assez sensiblement dégradé l’aspect extérieur de l’édifice, sans toutefois réussir à en dissimuler le très grand intérêt, qui a justifié sa récente inscription à l’Inventaire supplémentaire des Monuments historiques.