Inscrite à l’Inv. Suppl. des Monuments historiques le 23 septembre 1970
La commune de Caupenne possède deux églises : Saint-Laurent située à 3 kilomètres au sud de l’agglomération principale ; Saint-Martin, qui s’élève au cœur du village.
Cette église Saint-Martin est désignée vers le milieu du XIIe siècle dans le Livre rouge de la cathédrale de Dax sous le nom de Sanctus Martinus de Gueites. Un peu plus tard, un acte des Rôles gascons de l’administration anglaise indique que c’est dans cette paroisse qu’est situé un castrum du roi, dont un autre acte précise qu’il porte le nom de Caupenna. Par la suite, le château élevé sur ce castrum, à quelque 500m au sud de l’église, sera détenu par une famille qui en prendra le nom, et dont de nombreux documents attesteront l’influence dans la région au cours des siècles ultérieurs. Le même nom sera plus tard donné à l’église.
L’édifice
De l’église mentionnée dans le Livre rouge ne subsiste plus aujourd’hui qu’un chevet roman au parti aussi rigoureux qu’harmonieux. À l’extérieur de ce chevet, que l’on peut attribuer au deuxième quart du XIIe siècle, le décor, rythmé par des contreforts, des bandeaux et la corniche supérieure, concerne tout d’abord les fenêtres, de simples fentes étroites qui s’ouvrent dans une arcade cantonnée de colonnettes ; au-dessus des chapiteaux de ces colonnettes, les tailloirs prolongent le motif d’un bandeau qui ceint tout le pourtour.
Au sommet du mur, des modillons soutiennent une corniche.
Tous ces éléments sont malheureusement, comme l’appareil des murs, faits d’une pierre friable que l’on retrouve dans bien des édifices des environs. Certains sont donc très dégradés, mais quelques modillons mieux conservés que l’on peut encore voir dans les combles de la sacristie permettent d’apprécier la finesse et la qualité de cette sculpture.
À l’intérieur, l’application d’un décor moderne a fait disparaître beaucoup d’éléments du parti originel. Seuls subsistent le cul-de-four et le berceau du chœur, ainsi que les deux chapiteaux à feuillages, aujourd’hui dissimulés derrière le retable, qui encadrent la fenêtre d’axe.
Les thèmes traités sur toutes ces œuvres sont intéressants : les chapiteaux portent des feuilles lisses ornées, comme à Saint-Sever, de boules à leur extrémité, ou le vieux thème paléochrétien des oiseaux picorant une grappe – remplacée ici par un simple fruit de forme allongée – pour symboliser l’Eucharistie ; des rinceaux de palmettes courent sur les tailloirs et les frises ; les modillons sont simplement décorés de billettes, de rouleaux, de feuilles à boules, mais aussi de lions couchés, d’aigles, et même d’exhibitionnistes, des thèmes fréquents dans la première moitié du XIIe siècle de part et d’autre des Pyrénées.
Assez tôt sans doute dans le xive siècle, la nef, qui n’était encore que charpentée, a été prolongée par une tour puissante, avec ses contreforts reliés par des arcades sur le mur ouest, ses étages, ses archères. Au siècle suivant, la guerre de Cent Ans étant terminée, l’augmentation de la population qui s’en est suivie a contraint à agrandir l’édifice par la construction de collatéraux, dans les murs desquels on a remployé de nombreuses pierres portant des marques de tâcherons et provenant des gouttereaux de la nef, démolis en vue de ces travaux.
Des différences de dimensions des fenêtres et de forme des remplages, mais également de profil des arcs révèlent que la construction des collatéraux s’est prolongée du XVe au XVIe siècle. Par la suite, la nef a été à son tour couverte d’une voûte d’ogives avant d’être prolongée de toute la longueur du rez-de-chaussée de la tour par l’ouverture d’un grand arc dans son mur occidental.
Au XVIIe siècle enfin, un petit porche a été accolé au nord de la tour. Il abrite une porte classique, et une inscription latine très décorative réservée en relief sur le mur du collatéral, y invoque la prière de « sainte Marie, saint Martin, saint Jean Ba[ptiste], saint Michel, saint Roch ».
Tout l’intérieur a été couvert en 1875 de peintures décoratives ou figurées qui ont fait en 2003 l’objet d’une restauration très attentive.
Sur le mur nord du chœur, trois arcades entourent au centre le Christ assis sur un trône d’or et bénissant de la main droite, à droite l’évangéliste saint Luc, à gauche saint Jean.
Sur le mur sud, de part et d’autre d’une fenêtre, on reconnaît, également sous des arcades, saint Matthieu et saint Luc.
Le mobilier
À l’intérêt de l’édifice lui-même s’ajoute celui d’un mobilier de grande qualité. La sculpture du linteau et des pilastres du portail d’entrée, la porte elle-même, celle du clocher et l’ensemble des boiseries ne sont pas sans évoquer la décoration caractéristique des châteaux et autres belles demeures de cette région de la Chalosse. Les boiseries, composées de panneaux droits ou galbés avec un simple décor d’applique, recouvrent aussi bien les murs de la nef que du chœur et elles intègrent aussi les confessionnaux.
Les murs de la sacristie sont également recouverts de lambris et de boiseries.
Les portes des meubles aux moulures d’inspiration Louis XV sont ornées de motifs floraux et végétaux. Il semble que, comme celles de l’église, ces boiseries datent du début du XIXe siècle, époque où l’abbé Farthouat, appelé aussi le Père de Caupenne, menait dans la paroisse son œuvre de missionnaire qui s’est prolongée pendant toute la première moitié du XIXe siècle.
C’est au siècle précédent, vers 1770, qu’a été réalisé le maître-autel de marbre, œuvre des frères Mazzetti, sculpteurs d’origine suisse, qui ont travaillé vers la même époque dans la paroisse voisine de Laurède. Le maître-autel de Caupenne et celui de Laurède ont un décor tout à fait comparable, même si leur tabernacle est différent. On peut se demander si les Mazzetti sont venus à Caupenne à la demande du curé de l’époque, ou à l’instigation de la famille de Cés-Caupenne qui occupait le château tout proche.
Le retable qui surmonte le maître-autel est en bois et comprend trois compartiments délimités par des colonnes en partie cannelées, en partie décorées de motifs végétaux. Les statues de saint Pierre et de saint Paul encadrent la toile centrale qui représente une Crucifixion, avec la Vierge à la droite du Christ et le saint patron de l’église, saint Martin, à sa gauche. Les soubassements de bois sont peints en faux marbre.
L’autel de la Vierge, dans le collatéral sud, est surmonté d’un retable composé d’une toile centrale qui représente l’Institution du Rosaire (Vierge à l’Enfant et saint Dominique), entourée de chaque côté par une colonne torse sur la majeure partie de sa longueur. Le retable se termine latéralement par une longue volute.
Plus naïfs, plus récents (XIXe siècle), mais non sans intérêt sont l’autel et le retable du collatéral nord, dédiés à saint Jean-Baptiste, saint Michel et saint Roch dont le nom est gravé sur le mur est du porche d’entrée. L’autel galbé et le tabernacle aux ailes encore très décorées s’accompagnent de trois toiles représentant les trois saints patrons et séparées par des pilastres à l’antique.
Dans la nef, on admirera aussi l’immense et magnifique lustre en bois du XVIIIe siècle, qui aurait été fabriqué pour le théâtre de Bayonne. Aux branches de ce lustre sont suspendus tous les fruits du pays – cerises, poires, pommes, pêches, raisins – ainsi que certains grains que l’on pouvait y cultiver – le maïs en particulier.