Église inscrite à l’Inv. Suppl. des M. H. le 30 juillet 1968

L’édifice

En l’absence de sources documentaires antérieures au procès-verbal de la visite pastorale effectuée par Monseigneur de Sarret de Gaujac le 10 janvier 1751, il faut recourir à l’examen de l’architecture pour proposer une chronologie de cet édifice qui présente plusieurs caractéristiques communes à de nombreuses églises de la Lande.

Toutefois, les enduits qui masquent appareil et maçonnerie dans la totalité de l’intérieur et sur une bonne partie de l’extérieur ne font encore de cette analyse qu’une hypothèse.
La partie conservée la plus ancienne est manifestement la nef, formée de deux travées inégales, séparées par des colonnes engagées. La travée orientale, plus grande, ouvre sur le chœur. La faible épaisseur des murs en moyen appareil, et l’étroitesse des contreforts qui ne sont peut-être pas d’origine font supposer une couverture initiale en simple charpente. Aucune fenêtre ancienne n’apparaît actuellement.

La porte principale, ouverte à l’ouest, présente un décor réduit. Une seule archivolte retombe sur deux colonnes adossées aux chapiteaux historiés : à gauche un homme debout semble affronter un animal, peut-être un lion, tandis qu’un autre animal, la patte posée sur une volute, occupe seul la corbeille du chapiteau de droite. Il pourrait s’agir d’une représentation de Daniel dans la fosse aux lions, symbole de la lutte victorieuse du Bien contre le Mal. L’ensemble est d’une facture très maladroite. Le tympan, nu, est recoupé par un arc en anse de panier irrégulier, très postérieur. Par leur style, ces éléments romans peuvent dater de l’extrême fin du XIIe siècle.

Le chœur, en petit appareil, est formé d’une travée droite un peu moins large que la nef, et d’une abside à trois pans coupés. De petits contreforts plats en renforcent les angles. Il ne présente, à l’intérieur comme à l’extérieur, aucun décor sculpté. La voûte de la travée, un berceau brisé dont les arcs doubleaux retombent sur des culots, peut être une réfection comme une création du XIXe.

La voûte d’arêtes qui couvre l’abside est d’origine, puisque recouverte en partie de peintures médiévales. Le mur occidental de la nef se prolonge en un pignon percé de trois baies qui tient lieu de clocher.

La partie supérieure des murs de la nef présente au nord des meurtrières et des vestiges de corbeaux qui pourraient correspondre à un encorbellement défensif. Il est difficile de voir s’ils furent pour ce besoin surhaussés. Une pièce forte crénelée surmonte le chœur. Ces éléments fortifiés répondent sans doute, comme partout ailleurs dans la région, au besoin de transformer l’église, cœur de la paroisse et son bâtiment le plus solidement bâti, en un refuge pendant les troubles de la Guerre de Cent Ans.

Il faut au contraire attribuer à une période de paix et de prospérité le voûtement de la nef au moyen de croisées d’ogives. Celles-ci retombent sur les deux colonnes romanes et sur quatre culots dont trois sont sculptés, l’un d’un visage humain, les autres d’un dragon. Une simple rose orne l’une des deux clefs. La base des colonnes a en outre été retaillée selon un profil qui n’a plus rien de roman. C’est sans doute pour contrebuter leur poussée que de grands contreforts d’angles ont été ajoutés à l’ouest, et deux plus petits sur les murs latéraux. Ces aménagements, qui ne sont pas antérieurs au XVIe, pourraient ne dater que du début du XVIIe, comme dans d’autres églises landaises.

C’est un accroissement de population qui a sans doute nécessité l’agrandissement de l’église par la construction, au sud, d’un bas-côté rectangulaire simplement couvert d’une voûte de plâtre et mis en communication avec la nef par le percement de deux arcades.
Il peut être daté de la fin du XVIIe siècle ou du début du XVIIIe.

La sacristie prend place dans son prolongement, à l’est. La capacité de l’édifice fut aussi accrue par l’aménagement d’une tribune au revers du mur de façade, avec un accès depuis le bas-côté en perçant la naissance de la voûte.

L’ouverture des baies actuelles peut dater du XVIIIe comme du XIXe siècle. Plus tardive est l’ouverture d’une seconde porte dans le mur ouest du bas-côté. Enfin la mention, en 1889, de réparations au porche adossé à la façade permet de dater celui-ci et de supposer la préexistence d’un porche antérieur, peut-être de bois.

Le décor et le mobilier

L’élément majeur de l’église de Garein est constitué par ses peintures murales. Trois époques sont représentées. Le décor de l’abside, peut-être encore apparent en 1751, fut redécouvert en 1889, et « restauré » puis complété par les peintres bordelais L.. Augier et L. Millet. Un autre décor, sur le mur est du bas-côté, très probablement antérieur à 1751, est réapparu en 1993.

Seul le tracé du programme médiéval, réalisé au registre supérieur de l’abside, subsiste sous les repeints du XIXe. Il représente le Couronnement de la Vierge, entouré de deux anges astrophores (portant l’un le soleil et l’autre la lune). Son style ainsi que le mode de traitement du thème permet de le dater du XXIVe siècle.

Sur le registre inférieur a été peinte en 1890 une Vierge à l’Enfant, en majesté dans une mandorle, vers laquelle se tournent les deux saints particulièrement vénérés à Garein, saint Jacques le Majeur, représenté en pèlerin, et saint Antoine ermite, reconnaissable à son tau, sa clochette et son cochon, et fondateur de l’ordre des Antonins très lié au pèlerinage jacquaire. Leurs monogrammes et symboles, associés au monogramme de la Vierge et aux armes du Pape et de l’Évêque, constituent le décor peint en complément dans la travée droite du chœur.

Le décor du XVIIIe est constitué par une architecture feinte richement colorée, composée de colonnes, balustres et trophées ecclésiastiques, et surmontée d’une gloire de nuages. Il correspondait à l’autel dédié à saint Antoine.

Plusieurs pièces de qualité se remarquent dans le mobilier, malheureusement incomplet. On retrouve saint Antoine et saint Jacques représentés en bas-reliefs très mutilés sur les vantaux de la porte, qui est de la fin du XVIIe ou du début du XVIIIe, selon la disposition en vogue dans plusieurs églises du Marsan, comme à Geloux.

Les fonts baptismaux, à cuve de pierre et clôture de bois, placés à l’origine à l’abri dans la nef et non sous le porche, sont probablement antérieurs à 1751, tout comme la partie en bois de la chaire. La belle rampe de celle-ci, en fer forgé et tôle, est plus vraisemblablement de la seconde moitié du siècle. L’ancien siège du célébrant, également antérieur à la Révolution, présente la particularité de disposer d’un coffre pour les archives.

Sa partie supérieure a été modifiée, pour s’assortir à de belles boiseries de chœur, du deuxième quart du xix^e, constituées par le nouveau siège du célébrant et l’encadrement de porte de la sacristie qui lui fait pendant. Six bancs sont de même époque, ainsi sans doute que l’ancien autel majeur, cependant dans le style du siècle précédent. À la sacristie se remarquent enfin deux prie-Dieu à panneau peint dont l’un, représentant le Saint-Esprit, réemploie peut être un élément de l’abat-voix d’une chaire, la crédence d’un ancien chapier et plusieurs planches peintes d’un décor d’architecture très proche de la peinture murale du bas-côté et étrangement remontées dans un placard.

Malgré un premier abord peu engageant, particulièrement en venant de l’ouest, la petite église de Garein présente donc un intérêt certain. Et il faut se réjouir que des travaux de restauration dans les règles de l’art soient prochainement envisagés.