DAX, Église Saint-Vincent-de-Xaintes

Un peu d’histoire

« Qu’il soit bien connu de tous, présents et à venir, que Raymond de Bazas [l’Ancien], auquel presque toutes les églises cathédrales de Gascogne étaient soumises par le pouvoir épiscopal, Gui [Geoffroy Guillaume], duc d’Aquitaine [et de Gascogne], et d’autres seigneurs gascons, à savoir Raymond-Arnaud [fils du vicomte de Dax], son frère Garsie-Arnaud et Dodon d’Œyreluy, mus et enflammés par un dessein sage et certainement d’inspiration divine, voulant déplacer le siège de la sainte église de Dax, réunirent tous les grands dudit territoire, pour prendre leur avis ; promettant et confirmant par un serment solennel sécurité et liberté perpétuelles à cette église, ils la transférèrent du lieu où elle se trouvait depuis longtemps, c’est-à-dire de Saint-Vincent[-de-Xaintes], la fixèrent et l’établirent à l’intérieur des murs de la cité de Dax, et ordonnèrent et prescrivirent par leur ordonnance qu’elle serait établie là pour toujours et entourée d’une sainte vénération. »

En rapportant dans ces termes le transfert intra muros du siège épiscopal de Dax dans les années 1056-1057, l’acte n° 1 du Livre rouge de la cathédrale de Dax reconnaît à l’église Saint-Vincent-de-Xaintes, élevée à quelque 400 m à l’extérieur de l’angle sud-ouest de l’ancien rempart antique de la cité, la dignité d’avoir accueilli de longue date ce siège. Pour expliquer cette dignité, plusieurs textes, pour la plupart légendaires, ont situé en ce lieu un temple, dans lequel auraient été déposées les cendres du premier évêque de Dax, Vincent. Après une période d’oubli, ces reliques ayant été miraculeusement identifiées par la vierge Maxime, l’évêque Gratianus, qui assista au concile d’Agde de 506, aurait consacré l’édifice au culte chrétien ou élevé à sa place une basilique nouvelle.

Si le martyre de saint Vincent à Dax est mentionné dans un passage interpolé à une date indéterminée dans un manuscrit du viiie siècle conservé à Wolfenbüttel, il était en revanche ignoré de Grégoire de Tours, et l’on peut penser que c’est au plus tôt vers le xe siècle qu’a pu se former une légende destinée à expliquer l’origine du culte célébré depuis plusieurs siècles dans l’église Saint-Vincent. À cette époque en effet, on vénérait en ce lieu les reliques du saint, alors renfermées dans un grand sarcophage de marbre qui est parvenu jusqu’à nous.

Vers 1120, l’église Saint-Vincent fut donnée avec toutes ses dépendances à l’abbaye de la Sauve-Majeure par l’évêque Guillaume de Heugas ; cette donation, sur laquelle l’évêque avait aussitôt tenté de revenir, dut être renouvelée un peu plus tard sous la pression du légat pontifical Gérard d’Angoulême, et elle devait être de nouveau confirmée par le pape Calixte II.

En 1558, le comte de Candale, dans l’espoir de défendre plus efficacement la ville de Dax, menacée par l’avancée de troupes espagnoles, fit démolir l’édifice qui, repris peu après d’une manière médiocre, a dû être entièrement reconstruit à la fin du xixe siècle.

À cette occasion, des fouilles ont été menées sous la direction de deux membres de la Société de Borda, J.-Eugène Dufourcet et Georges Camiade : bien que les résultats n’aient fait l’objet que d’un compte rendu sommaire et dans lequel l’hypothèse tenait trop de place, ces fouilles ont permis de préciser et souvent de compléter les renseignements qui avaient déjà été recueillis un demi-siècle plus tôt. En 1854 en effet, des travaux de déblaiement entrepris «pour les besoin de l’agriculture» avaient permis de découvrir, outre des sarcophages et de nombreux objets, de «vieux blocs de maçonnerie» formant «un réseau inextricable». Auguste Dompnier, qui avait tenté d’en lever le plan, n’avait pu parvenir à «coordonner» ces maçonneries et avait dû se «borner à relever les principales et celles qui lui paraissaient s’harmoniser entre elles avec le plus de facilité».

Les trois premiers édifices

Plan historique église Saint-Vincent-de-Xaintes
Plan historique

 La gravité des destructions subies au cours des siècles, le manque de rigueur avec lequel ont été effectuées les deux séries de fouilles du XIXe, l’imprécision de leur publication et enfin le peu de sérieux des diverses légendes qui prétendent relater l’histoire de saint Vincent et de l’église qui lui est dédiée rendent bien aléatoire toute hypothèse sur les édifices qui ont pu se succéder en ce lieu. Pourtant, de l’ensemble des renseignements très divers que l’on peut recueillir de toutes ces sources, il semble que quelques lignes de force parviennent à se dégager.

Le premier édifice. Temple, ou villa antique ?

Au cours des fouilles de 1891-1892, on avait découvert, à l’intérieur du chevet reconstruit au XVIe siècle et des vestiges des chevets antérieurs, un rectangle de mosaïque (fig. xx) ayant fait partie d’un panneau quatre fois plus étendu, sur lequel avaient été posés plus tard quatre socles cruciformes à noyau cylindrique. Au sud-ouest de ces éléments, une double rangée de quatre colonnes de marbre semblait en place.

Mosaïque antique église Saint-Vincent-de-Xaintes
Mosaïque antique

Pour J.-E. Dufourcet et G. Camiade, la mosaïque devait correspondre à la cella du temple païen auprès duquel la légende situait le martyre de saint Vincent. Quant à la double colonnade, elle devait former un «péristyle» et l’on pouvait imaginer qu’il en avait au moins existé une semblable du côté nord.

Cependant, un doute était jeté sur la valeur des traditions qui fondaient toutes ces hypothèses, car les deux auteurs n’étaient parvenus à associer à ces vestiges aucun élément de maçonnerie de quelque importance : si le plan publié en 1854 par A. Dompnier révélait, à une distance de 9 à 13 m au sud-est de l’église, deux murs perpendiculaires l’un à l’autre et, plus au sud, des «fondations… appartenant à diverses époques », toutes ces maçonneries semblaient devoir être attribuées à l’église qui aurait été élevée par Gratien au vie siècle, et par celle que l’on a attribuée à l’évêque des Gascons Gombaud au xe.

Pourtant, les caractères du plus grand des fragments conservés au sud-est auraient dû retenir l’attention : en effet, ce mur, légèrement courbe et orienté du sud-ouest au nord-est, était fait de blocage, mais il comportait sur sa face concave un parement de petits moellons réguliers et une sorte de niche surmontée d’un arc appareillé en plein cintre de diamètre un peu inférieur à la largeur des piédroits. A. Dompnier voyait dans ce dernier élément une «fenêtre» ou une «croisée», mais un dessin qu’il a publié montre qu’il s’agissait sans doute simplement d’un arc de décharge surmontant le linteau d’une niche. Ce détail, ainsi que l’appareil régulier utilisé et les proportions mêmes de ces vestiges, semble permettre de leur attribuer une origine antique. En outre, ces particularités et surtout la distance qui sépare tous ces éléments et ceux qui, dans la partie sud-ouest, peuvent sans doute leur être encore associés, semblent moins correspondre au temple que l’on a voulu y reconnaître, qu’à une simple villa du Bas-Empire. Cette villa étant située à l’extérieur de la ville close et ayant donc été bientôt ruinée, a dû, comme souvent, accueillir dans ses murs un cimetière auquel la proximité de la cité a assuré un grand développement, et qui devait plus tard donner à l’église Saint-Vincent son nom – de Sanctis.

Une basilique du haut Moyen Âge

Après avoir ainsi retiré à l’église de Gratien quelques-unes des maçonneries que A. Dompnier, puis J.-E. Dufourcet et G. Camiade lui avaient attribuées, on doit sans doute lui rattacher plusieurs éléments que les deux auteurs de L’Aquitaine historique et monumentale avaient cru pouvoir associer à la mosaïque du «temple», et, selon l’analyse qu’en a faite Catherine Balmelle, cette mosaïque elle-même. En effet, les quatre colonnes de marbre disposées en deux files parallèles qui, lors des fouilles de 1891-1892, étaient apparues encore appuyées sur leur base à l’intérieur des maçonneries des gouttereaux de la nef du xvie siècle, et les quatre autres qui subsistaient dans le chœur sur le même alignement se trouvaient dans le prolongement d’un mur de 0,60 m d’épaisseur qui dessinait une abside à sept pans. Si les deux auteurs n’ont pas jugé utile d’indiquer les procédés de construction qui avaient été utilisés pour cette abside, on sait en revanche qu’elle ne comportait pas de contrefort, et que sa largeur intérieure atteignait pourtant près de dix mètres ; en outre, sa situation oblige certainement à la mettre en relation avec les colonnes de marbre qui devaient sans doute séparer les trois nefs de l’édifice auquel elle appartenait.

Chapiteau du Bas-Empire
Chapiteau du Bas-Empire
Chapiteau du VIe siècle
Chapiteau du VIe siècle

Cette utilisation de colonnes de marbre dans une nef suggère bien évidemment une datation très haute, qui se trouve du reste confirmée par les caractères des chapiteaux et des fragments découverts au voisinage de ces vestiges : en effet, si la fidélité au type corinthien que présentent certains de ces éléments permet sans doute de les attribuer, comme l’ont fait les auteurs de L’Aquitaine, à un édifice antique, c’est-à-dire, selon nous, à la villa du Bas-Empire, l’un d’entre eux est en revanche manifestement un peu plus tardif, et il peut donc certainement être rattaché à l’église que Gratien aurait édifiée au VIe siècle, une date qui pourrait être celle où le culte de saint Vincent a été introduit en ce lieu.

L’église du XIe siècle

La basilique du vie siècle dont on peut ainsi définir quelques-unes des particularités avait-elle survécu à toutes les vicissitudes du haut Moyen Âge, ou avait-elle été reconstruite au cours des siècles ? Rien ne permet de l’affirmer, mais en toute hypothèse, ce n’est pas avant le début de l’époque romane que fut élevé l’édifice en moyen appareil que les auteurs du siècle dernier ont attribué à l’évêque Gombaud, frère du duc de Gascogne Guillaume Sanche, dont ils avaient cru reconnaître les armes dans le chrisme surmontant la porte d’entrée principale de l’église.

De cet édifice, les seuls éléments d’architecture connus avec certitude appartenaient encore aux parties orientales : en 1891, lors de la démolition de l’église du xvie siècle, on avait pu constater que les murs de son abside avaient été élevés sur des fondations construites en «grand appareil» sur un plan semi-circulaire de quelque 13 ou 14 m de diamètre : ces maçonneries, que l’on ne pouvait hésiter à rattacher à l’église romane, enveloppaient le chevet du haut Moyen Âge, mais l’intervalle séparant les deux murs avait été comblé afin de transformer le chœur primitif en une crypte surmontée d’un sanctuaire surélevé. Dans le prolongement de cet ensemble, des remblais avaient enseveli sous le nouveau chœur et la nouvelle nef les bases et la partie inférieure des fûts de colonnes de l’ancienne basilique.

Les autres éléments découverts en 1854 et en 1891 étaient beaucoup plus difficiles à interpréter et, comme la description qui en a été donnée est très peu précise, il est aujourd’hui impossible d’en donner une explication quelque peu assurée. Il semble cependant qu’à la différence de la nef du xvie siècle, qui était plus étroite que le chœur, celle qui fut édifiée à l’époque romane atteignait une largeur de 18 m environ : si l’on accepte l’identification et la datation des maçonneries qui ont été proposées par A. Dompnier, on peut en outre considérer que, près de son extrémité occidentale, elle était flanquée de part et d’autre de constructions rectangulaires et prolongée par une vaste bâtisse terminée par un mur courbe. Le plan ainsi dessiné n’est pas sans rappeler celui de certains ensembles occidentaux comportant un transept et un chevet qui ont été élevés à l’époque carolingienne ou au début de l’époque romane. Mais la date avancée dans le XIe siècle que semblent indiquer les procédés de construction et les éléments sculptés conservés ne permet pas de retenir une telle hypothèse : si ces constructions ont bien appartenu à l’église romane, elles peuvent avoir constitué une sorte de porche et des dépendances élevés à une date indéterminée.

C’est dans ces parties, mais dans un endroit qui n’est pas exactement précisé, que se trouvait le chrisme, aujourd’hui disposé au milieu d’un tympan sous un arc en plein cintre, c’est-à-dire sans doute à sa place originelle au-dessus de la porte de l’église romane. On pouvait enfin rattacher au même édifice deux autres éléments : une plaque portant en relief une partie de l’inscription tumulaire de l’évêque Macaire et un chapiteau de grès attenant à une portion de colonne qui avait été pris dans les maçonneries d’une sacristie tardive. C’est ce chapiteau qui, avec le chrisme de nouveau remployé au-dessus de la porte occidentale de l’église actuelle, peut, aujourd’hui, par des comparaisons avec des œuvres semblables d’autres édifices, apporter quelque indication sur la date à laquelle a été élevée l’église romane Saint-Vincent.

Le chapiteau

Cette œuvre, que les auteurs de L’Aquitaine avaient cru pouvoir attribuer à la basilique de Gratien, a été arasée dans la partie supérieure de deux de ses faces latérales avant d’être utilisée comme moellon : elle comporte un épannelage en forme de parallélépipède et tronc de cône qui est attenant à une portion de fût. Sa partie supérieure porte une sorte de tresse continue faite d’anneaux à une, deux ou trois boucles ; sur la partie chanfreinée, des palmettes faites de neuf lobes bombés sur les angles, de cinq au milieu de la face principale, alternent avec de longues folioles courbes taillées en gouttière pour former une frise unique. Ces divers éléments rattachent ce chapiteau à un vaste ensemble d’œuvres qui, à travers la Gascogne centrale et orientale, présente une intéressante variante d’un type associant des entrelacs, des rinceaux et des palmettes dans des compositions rigoureusement organisées.

Le chrisme

  Sur cette œuvre, les divers éléments du chrisme ont été traités d’une belle manière décorative. La plupart des tiges sont pattées, plusieurs lettres sont nouées entre elles et deux étoiles à trois branches entrelacées occupent les espaces laissés libres par le thème principal. L’ensemble est enfermé dans deux cercles concentriques. Tous ces détails sont réservés en faible relief, mais le dessin est très précis et souvent élégant et l’on devine la souplesse qu’offrait le modelé avant les dégradations qu’il a subies. Par ces caractères et en dépit de différences de thème et de conception, ce bel élément demeure d’esprit très proche du précédent, et l’on peut penser qu’il en est à peu près contemporain.

L’inscription tumulaire

En démolissant en février 1892 le clocher de l’ancienne église Saint-Vincent, on avait projeté au sol un plaque de marbre blanc de Saint-Béat qui avait été remployée dans le blocage et qui s’était brisée dans la chute. Ce n’est que deux mois plus tard que l’on se rendit compte que deux des fragments retrouvés dans les déblais portaient une inscription en relief (fig. xx), correspondant à l’épitaphe de l’évêque Macaire, déjà incomplète au xviiie siècle, mais qui avait été lue et transcrite par les auteurs de la Gallia Christiana.

Cette transcription a été reprise, corrigée et traduite de la manière suivante par l’abbé Degert d’après des fragments conservés :

MORIBUS ET MERITIS VITA ATQUE […] HOC IACET IN TUMULO MACHARIUS ORDINE PRESUL CELLA MODVLFENS … LET PATRIA GENERATUS.

ABBAS EGENIS …. IN PUERILI VENIT AD ALMUM…T CENOBII ………. EDOCTUS.

PRINCIPIBUS PATRIA .…HERESIM …. SIMONIACAM

« [Remarquable] par ses mœurs et ses mérites, sa vie et […] Macaire, élevé au rang d’évêque, repose en ce tombeau. Il [illustra] le pays de Saramon dont il est originaire.

Abbé, pour les pauvres… dès son plus jeune âge il gagna les hauteurs… du monastère… instruit.

Par les princes du pays … l’hérésie … simoniaque. »

Macaire, abbé de Saramon, fut le premier évêque autonome appelé au siège de Dax en 1060 en remplacement de Raymond II [le Jeune], qui avait jusque-là cumulé les sièges de Bazas, Bayonne et Dax. Il n’a occupé le siège que trois années, jusqu’à sa mort en 1063.

L’église actuelle abrite un autre monument funéraire, le gisant d’un évêque malheureusement très usé et mutilé, qui a été placé dans la chapelle des fonts baptismaux.

L’église de la fin du xixe siècle

Du fait de l’accroissement de la population de la paroisse de Saint-Vincent-de-Xaintes au cours du xixe siècle, l’ancienne église du xvie siècle apparaissait très insuffisante : un concours avait donc été ouvert en 1878 en vue de son agrandissement. Le projet « Alleluia », œuvre de l’architecte Roger Legrand, fut classé n° 1 : conformément au programme, il proposait de conserver le clocher et la nef de l’église ancienne, en renforçant cette dernière par des contreforts extérieurs et des pilastres à l’intérieur, en agrandissant ses fenêtres et en ménageant une nouvelle entrée dans le mur sud de la première travée ; l’agrandissement souhaité était obtenu par la création d’un transept et d’un vaste chevet.

Ce projet n’a pas été réalisé ; en 1876 en effet, avait été nommé au siège d’Aire et de Dax un nouvel évêque, Mgr Victor Delannoy, très féru d’architecture paléochrétienne, et qui, dès 1884-1885, avait guidé la restauration de la crypte de l’ancienne abbatiale Sainte-Quitterie du Mas d’Aire en s’inspirant des catacombes romaines. On peut penser que c’est l’influence de ce prélat, confortée sans doute par les vestiges découverts au cours des fouilles, qui explique le choix qui allait être fait d’un nouveau projet proposé en 1891 par Ed. Ricard, architecte de la ville de Dax. Ce projet prévoyait une reconstruction totale de l’édifice.

Après la réalisation par des membres de la Société de Borda de fouilles complètes du terrain permises par la démolition de l’ancienne église, les travaux furent menés assez rondement pour être terminés dès le début de 1894 et pour un coût nettement inférieur aux devis initiaux.

Une basilique paléochrétienne selon le goût de l’époque

L’inspiration « archéologique » de Mgr Delannoy apparaît nettement dans de nombreux éléments du parti adopté pour la nouvelle église, mais elle est en quelque sorte tempérée par des apports de tout autres origines. Comme les anciennes basiliques, l’édifice comporte des absides en hémicycle voûtées en cul-de-four, et trois nefs séparées par des colonnes, généreusement éclairées, et couvertes de plafonds à caissons peints.

Ensemble sud
Extérieur du chevet et du transept

Mais, entre ces deux ensembles, s’intercalent la croisée et les bras d’un transept, ainsi qu’une travée de chœur ; un clocher s’élève à l’extrémité occidentale.

Intérieur vers l’est
Nef vers l’ouest
Chapiteau du transept

Transept et chœur sont également couverts de plafonds à caissons, et le chœur et la nef communiquent avec le transept par une grande arcade portée par de hautes colonnes adossés. L’abside et les extrémités des bras du transept sont percées chacune de trois grandes fenêtres, et le carré est éclairé par quatre fenêtres ménagées dans ses murs est et ouest. Enfin, le clocher associe des dispositions romanes – une arcade portée par des colonnettes, une corniche portée par des modillons et décorée de métopes, des arcades aveugles sur colonnes ou sur pilastres, de petites arcatures reposant sur des corbeaux –, et des claustra au dessin très moderne.
     Des éléments d’esprit aussi différent pourraient constituer un ensemble très disparate ; ils sont au contraire parfaitement intégrés dans un ensemble très cohérent.

Cette cohérence a heureusement été maintenue par des transformations pourtant importantes apportées par la réfection du sanctuaire réalisée par l’architecte René Guichemerre dans les années 1960

En dépouillant ces parties de leur décor et de leur mobilier de la fin du xixe siècle, et en donnant une place d’honneur à des éléments particulièrement vénérables du passé, cette réfection a encore renforcé le caractère « archéologique » de l’édifice : on a ainsi disposé au centre, sous la table de l’autel, le grand sarcophage nu qui, selon la tradition, avait accueilli les restes de saint Vincent, et l’on a disposé en avant, au bas de l’emmarchement, la mosaïque antique qui avait été placée antérieurement près de l’entrée.  Tous les autres éléments de mobilier – sièges du clergé, tabernacle –, ont été discrètement intégrés à l’architecture.

Tombeau dit de saint Vincent
Tombeau dit de saint Vincent

Un remarquable ensemble de vitraux de l’atelier Dagrand de Bordeaux

Christ glorieux bénissant

En dépit du nombre considérable de fenêtres entraîné par le choix du parti adopté – 43 au total –, l’atelier Dagrand qui a réalisé tous les vitraux a pu les livrer dans les limites d’une seule année, si l’on en juge du moins par la date de 1893 que portent plusieurs d’entre eux. Parmi ces vitraux, beaucoup sont simplement décoratifs, mais on n’en compte pas moins de 15 historiés, qui se rattachent à un programme iconographique d’une grande cohérence.

Dans ce programme, le sanctuaire est dominé par la grande figure du Christ, qu’entourent les deux saints patrons de l’église. Le Christ est représenté debout, bénissant de la main droite et tenant de la gauche le Livre où l’on peut lire : « Ego sum via veritas et vita » ; une autre inscription indique : « Comme mon Père m’a envoyé je vous envoie » ; enfin, à l’intérieur d’un quadrilobe, un écusson posé sur un conopée et portant le mot « Evangile », est accompagné de la mention « Dulau curé » et de la date de 1893. Le vitrail de gauche représente saint Vincent, avec l’inscription : « Saint Vincent de Xaintes Premier évêque de Dax et martyr ». Celui de droite figure : « Saint Laetus diacre frère compagnon d’apostolat et de martyre de St Vincent ».

Christ glorieux bénissant

our introduire en quelque sorte à cet ensemble, deux vitraux placés au sommet des murs gouttereaux de l’avant-chœur représentent les deux protecteurs de l’Église dacquoise que sont la Vierge de Buglose représentée à gauche, et saint Vincent de Paul, à droite.

Notre-Dame de Buglose
Notre-Dame de Buglose
Saint Vincent de Paul
Saint Vincent de Paul

Le transept, et plus précisément les deux triplets des extrémités de ses bras célèbrent la geste du saint patron. Au nord, on voit de droite à gauche : « Comment Saint Vincent parti de Saintes débarque à St Jean de Luz », « Comment saint Vincent évangélisa la Novempopulanie », « Comment St Vincent ayant converti le temple de Lucine en oratoire chrétien fonda le St Siège épiscopal de Dax ».

Construction de l'église chrétienne
Construction de l’église chrétienne

Au sud, sont figurés de gauche à droite : « Comment SS. Vincent et Lætus ayant refusé de sacrifier aux idoles remportèrent la palme du martyre », « Comment se prêtait le serment décisoire dans la crypte et sur le tombeau de St Vincent », « Comment après la translation du siège épiscopal à Dax (xie siècle) le chapitre de la cathédrale se rendait chaque année en procession à St Vincent ».

Martyre de Vincent et de Lætus
Martyre de Vincent et de 
Lætus
Pèlerinage au tombeau de saint Vincent
Pèlerinage au tombeau de saint Vincent

Les vitraux de la nef s’inscrivent dans des perspectives différentes  : tout naturellement, celui des fonts baptismaux, au fond du collatéral de gauche, représente le Baptême du Christ, avec l’inscription « Je puis être baptisé par toi, Tu viens à moi », et la mention : « Don de Mme J.M.T. 1893 ». Au fond du collatéral de droite, la figure de Saint Martin et du mendiant est accompagnée de « Martin encore catéchumène m’a revêtu de son manteau » et « Saint Martin patron de l’ancienne chapelle de Saubagnacq », une église jadis située dans la partie méridionale de la paroisse de Saint-Vincent.

Baptême de Jésus par Jean-Baptiste
Saint Martin partage son manteau avec un pauvre
Saint Dominique

C’est la présence de deux institutions dans la même paroisse qui explique les représentations de la travée orientale des deux collatéraux : à gauche, saint Dominique et l’inscription « Vade et prœdica » évoquent le couvent de religieuses dominicaines qui s’élève au chevet de l’église ; à droite, le vitrail représentant « St Louis de G[onzague] » est un « Don de l’Institution Notre-Dame », jadis située à quelques centaines de mètres au sud de l’église.

Bibliographie

« Idée historique de l’église cathédrale de Dax, avec une introduction du P. Coste », Bulletin de la Société de Borda, t. 39, 1915, p. 439-454 et 487-501, ici p. 445-446.

Arambourou (R.), « À propos de Saint-Vincent-de-Xaintes », Bull. Soc. Borda, t. 85, 1961, p. 9-14.

Balmelle (C.), Recueil général des Mosaïques de la Gaule, iv – Aquitaine – 2, Paris, 1987, p. 62-65.

Cabanot (J.), « Chapiteaux de marbre antérieurs à l’époque romane dans le département des Landes », Cahiers archéologiques, Fin de l’Antiquité et Moyen Age, xxii, 1972, p. 7, 11, 13-14 et fig. 6, 16, 17, 21a et b.

Dompnier (A.), Saint Vincent de Sentes, patron de Dax, et sa cathédrale, étude historique et archéologique, Dax, 1855, p. 17, 21 et 70.

Dufourcet (J.-E.), Camiade (G.), « St Vincent de Xaintes, premier évêque de Dax », dans L’Aquitaine historique et monumentale, Monographies locales illustrées, Dax, 1890-1897, t. ii, p. 3-43.

Taillebois (É.), « Quelques mots sur deux sépultures gallo-romaines découvertes à Saint-Vincent-de-Xaintes », Bull. Soc. Borda, t. 5, 1880, p. 187-193.

Préserver l'histoire, célébrer la foi : Ensemble pour les Églises Landaises.

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